Chacun de ces deux mots peut être utilisé indifféremment, soit à titre de
juron, soit pour désigner une prostituée. Mais quoi qu'il en soit, la forme
courte passe pour être le diminutif de l'autre, ce qu'elle a bien l'air d'être,
en effet. L'histoire est bien différente et très intéressante...
Il faut savoir que jusqu'au Moyen Âge, on utilisait pour chaque substantif
deux formes, qui étaient les vestiges des anciennes déclinaisons latines. Ces
dernières avaient six "cas", ou formes différentes pour un même mot, et étaient
utilisées selon sa fonction : une forme pour le sujet, une pour le complément
d'objet etc. Six formes pour le singulier et six autres pour le pluriel. C'est
le fameux "rosa, rosa, rosam" immortalisé par Jacques Brel.
Les déclinaisons existent toujours en allemand et dans les langues slaves,
mais elles sont tombées en désuétude en français. La langue médiévale a
cependant gardé pour chaque mot les deux formes dont nous parlions plus haut :
le cas sujet (naturellement à utiliser uniquement quand le nom
est sujet dans la phrase) et le cas "régime", à utiliser pour
toutes les autres fonctions. Ainsi, disait-on "li murs" pour dire que le
mur était blanc, et "le mur" pour dire qu'on avait peint ce dernier
(COD).
On désignait une prostituée par le mot "pute" à chaque fois que le
mot était sujet. Par contre, quand il ne l'était pas, c'est la forme
"putain" (cas régime) qui devait être employé. Exemple : "une pute m'a
abordé dans la rue", mais "j'ai couché avec une putain".
Le français moderne a oublié ce vestige de déclinaison, et il n'est pas
fautif d'employer l'un pour l'autre, mais le faire quand on le sait est assez
plaisant, d'autant plus que "pute" et "putain" représentent le seul et
dernier reste des déclinaisons latines en français.
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