Le "cécifoot", soit la contraction de cécité et football. Un handisport dans lequel les Français n'oublient pas de briller. Lundi à Aksaray en Turquie, les Bleus ont remporté en finale face à l'Espagne (1-0) leur second titre consécutif de champion d'Europe et, par la même occasion, composté leur billet pour les Jeux paralympiques de Londres, qui se dérouleront l'été prochain. Une performance de haut vol qui attire l'attention sur une discipline où voyants et non-voyants mouillent le même maillot.
S'il est l'adaptation du "futsal" pour aveugles et malvoyants, le cécifoot se pratique sur un terrain… de handball. Il est délimité par des barrières d'un mètre vingt, "pour permettre au ballon d'être constament en jeu et rendre celui-ci plus vif et dynamique", explique Julien Zelela, directeur de la commission technique fédérale de cécifoot et lui même non voyant. Pour rythmer le jeu justement, un ballon sonore composé de petites billes métalliques, qui émettent un son de maracas, met les joueurs au diapason. Une invention de prisonniers brésiliens, qui pour assouvir leur passion malgré leur handicap et l'incarcération ont mis au point ce système de sphère sensorielle.
Autre originalité de ce sport : si pour chaque équipe le gardien de but est voyant, les quatre joueurs de champ sont aveugles ou malvoyants. Pour maintenir une parfaite équité, ces derniers doivent porter un pansement oculaire doublé d'un bandeau. Interdiction aux dix acteurs de toucher à cet assemblage sous peine de carton jaune ou rouge. Sur un terrain de cécifoot, pas le droit de voir mieux que les autres. Par ailleurs, tout joueur convoitant le ballon est tenu d'en avertir son porteur par un signal vocal prédéfini (en criant "voy", prononcer "voille") avant chaque duel. Ces règles strictes de signalement visent à anéantir toute confusion liée au handicap physique des joueurs. Enfin, chaque équipe profite des indications d'un "guide" placé derrière le but adverse et chargé d'orienter les attaquants de son équipe en leur indiquant leur position par rapport au but ou bien encore l'angle de tir à adopter.
Au cours des deux mi-temps de vingt-cinq minutes, l'interactivité entre les athlètes valides et les déficients visuels est permanente : "Un exemple de partage et de mixité", selon Julien Zelela. Ce dernier se félicite des progrès effectués en France quant à la pratique du cécifoot : "La première association de cécifoot s'est créée en 1987 à Saint-Mandé. Officiellement, le sport est apparu à la fédération handisport en 1998 et la discipline a été admise aux Jeux paralympiques en 2004 à Athènes. On évolue bien même si malheureusement on ne peut pas dire que la France soit un pays de sport. Mais le succès est là, d'ailleurs toutes les places de cécifoot pour les Jeux parlaympiques de Londres ont déjà été vendues, ce qui n'est pas le cas de tout les handisports."
Comme les Jeux olympiques, le championnat d'Europe de cécifoot a lieu tous les quatre ans et les pays représentés sont pour la plus part imprégnés de la culture du football : outre la France, l'Angleterre, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, la Grèce, la Russie et la Turquie – organisatrice de l'événement – étaient au rendez-vous cette année. Hormis la Turquie, toute ces nations ont pour point commun d' avoir déjà remporté un Euro de football. Pas un hasard donc que le cécifoot se développe là où le football est roi. Autre exemple, le champion du monde en titre n'est autre que le Brésil. Un parallèle que l'on retrouve également à travers le mimétisme des équipes de cécifoot avec leurs homologues du football dans le jeu proposé. Ainsi Julien Zelela explique que "l'équipe d'Angleterre a tendance à pratiquer le kick and rush, c'est-à-dire à jouer long en essayant de trouver directement leur attaquant de pointe, l'Espagne joue tout en technique et en toque (passes courtes et rapides) alors que les Italiens ont la culture de la défense".
Cette année, l'équipe de France a dominé l'Allemagne et l'Italie en phase de poule avant de vaincre le pays hôte (2-0) puis l'Espagne en finale (1-0). "Sur cette édition le niveau était particulièrement relevé,poursuit le directeur technique fédéral de cécifoot. L'ancien footballeur international camerounais Samuel Ipoua [passé par l'OGC Nice ou encore l'Inter Milan] est venu assister au tournoi, lorsqu'il a vu les matches il était extrêment surpris du niveau de jeu, de la vitesse, il ne pensait pas que cela serait si proche du football."
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