L'Oxford English Dictionary (OED) est un dictionnaire de
référence pour la langue anglaise.
Le projet prend forme avec une conférence prononcée en 1857
à la British Library par Richard Chenevix Trench, poète, membre de la
Philological Society et doyen de Westminster. Identifiant diverses lacunes des
dictionnaires anglais, Trench s'attaque principalement au fait que les
dictionnaires veuillent dicter l'usage au lieu de simplement l'enregistrer.
Tout au contraire de cette pratique habituelle, un dictionnaire devrait être «
un inventaire du langage » (an inventory of the language) et répertorier tous
les mots qui sont ou ont été en usage dans la langue. La tâche essentielle d'un
dictionnaire serait donc de retracer l'histoire et la trajectoire de chaque mot,
en illustrant par des citations les nuances de sens et d'emploi apparues au fil
du temps. Pour mener à bien une entreprise d'une telle ampleur, Trench propose
un mode de rédaction révolutionnaire et démocratique, qui est de lancer un
appel public à des collaborateurs bénévoles — un procédé qui est aux antipodes
du système élitiste et hiérarchique incarné par l'Académie française.
La rédaction du dictionnaire est d'abord confiée à Herbert
Coleridge, qui meurt deux ans plus tard et auquel succède Frederick Furnivall.
Les rédacteurs demandent à la population anglaise de reporter sur des fiches
toute citation illustrant le sens ou l'emploi d'un mot-cible (entrée), avec la
référence précise. Le premier appel date de 1858. Après une première période
féconde d'une dizaine d'années au cours desquelles 6 millions de fiches furent
reçues, l'enthousiasme se refroidit et le projet est en panne, courant le
risque d'être abandonné.
Un nouveau directeur de rédaction est nommé en 1879, en
accord avec le futur éditeur du dictionnaire, Oxford University Press. James
Murray (1837-1915), un Écossais polyglotte et passionné de lexicographie,
relance le projet, en élargissant la demande de contributions bénévoles aux
États-Unis et aux colonies britanniques. Dans le prospectus de huit pages
décrivant le projet, il établit notamment une liste de 200 auteurs
indispensables dont les œuvres doivent servir de base à son dictionnaire et
donne des instructions très précises sur la façon dont les bénévoles doivent
procéder. Les lecteurs sont notamment invités à ne pas se limiter aux mots
rares.
Le chirurgien américain William Chester Minor
(1837-1920) a été un des contributeurs bénévoles les plus importants : il a
contribué au projet dès qu'il en a pris connaissance en 1880 et a continué
jusqu'en 1901, remplissant des milliers de fiches d'une remarquable qualité.
Certains bénévoles ont envoyé jusqu'à 10 000 fiches par an, mais elles n'avaient
pas la même pertinence et se révélaient donc moins utiles au projet. Pendant
plusieurs années, Murray et Minor communiquent par écrit, et ce n'est que lors
de leur rencontre en 1891 que Murray découvre que l'Américain lui écrit depuis
une cellule psychiatrique où il est emprisonné pour un meurtre qu'il avait
commis alors qu'il était sous l'emprise d'une de ses fréquentes crises de
démence paranoïaque. Ce dernier avait trouvé dans ce travail de lexicographie
un moyen de s'évader mentalement et de se rendre utile au monde, sans toutefois
jamais retrouver sa pleine raison. Sa cellule était tapissée de livres.
Dès 1884, les fiches arrivent de partout au bureau de
Murray, à Oxford, au rythme d'environ 1 000 par jour. Elles sont triées,
vérifiées et classées par divers employés dont font partie ses nombreux enfants.
Elles sont ensuite disposées sur des tables pour être examinées par la petite
équipe de rédacteurs spécialisés, sous la direction de Murray, et intégrées à l'article
sur le mot du moment, le dictionnaire progressant en ordre alphabétique à
raison de quelque 33 mots par jour. Les articles terminés sont envoyés à la
composition au fur et à mesure, de sorte qu'un nouveau fascicule peut être
publié chaque année.
À la mort de Murray, Henry Bradley (1845-1923) qui était
corédacteur de l'ouvrage depuis 1888, prend la direction du projet. William
Craigie (1867-1957), qui travaillait au projet depuis 1897 et en était devenu
troisième corédacteur en 1901, prend la relève jusqu'à la fin du projet, en
1933. Charles Talbut Onions (1873-1965), intégré au projet dès 1895, en devient
corédacteur de 1914 à 1933. C'est sous sa direction que collabore à ce projet
le jeune J. R. R. Tolkien en 1919-1920.
Le dernier fascicule paraît en 1928. Ce dictionnaire compte
alors un total de 15 487 pages reliées en 12 gros volumes, avec 414 825
articles qu'illustrent 1 827 306 citations. Un premier supplément paraît en
1933 et quatre autres sont publiés entre 1972 et 1986. En 1989, l'ensemble est
réédité. L'ouvrage est publié sur CD-ROM en 1992 et devient accessible en
ligne, sur abonnement, à partir de 2000.
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